Le piétonnier le plus paradoxal d’Europe

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PLATFORM PENTAGONE – COMMUNIQUÉ DE PRESSE 

Ce 29 février, au terme de la phase-test du plan de circulation, les indicateurs retenus par la Ville de Bruxelles pour son évaluation restent inconnus du public. Les modifications partielles intervenues ne sont pas autrement motivées.

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Le chaos redouté n’a pas eu lieu… mais qui vient encore dans le centre-ville ?

En décidant délibérément de se passer d’études d’incidences et de concertation avec les citoyens, la Ville Bruxelles pensait pouvoir imposer un changement dans les comportements des usagers du centre-ville. En dépit de la promesse de parkings supplémentaires pour accéder au plus près du piétonnier, cette manière de procéder à la hussarde aura surtout fait l’effet d’un épouvantail pour bon nombre d’automobilistes qui ont préféré changer de destination plutôt que de changer de moyen de transport. Il est vrai que l’insuffisance de parkings de délestage à l’entrée de Bruxelles conjuguée avec la régression de l’offre de transports en commun vers le centre ne les ont pas encouragés à modifier leurs habitudes.

Globalement moins de voitures, mais davantage de nuisances dans de petites rues

La volonté politique affirmée de diminuer la circulation dans le Pentagone sans gestion adéquate de la signalisation pour préserver le trafic de destination est à l’origine de la baisse du chiffre d’affaires dont se plaignent de nombreux commerçants.

Le report du trafic des boulevards centraux, larges et aérés, vers de petites rues latérales, sinueuses, étroites et rapidement saturées, d’où les gaz d’échappements peinent à s’évacuer, a considérablement dégradé la qualité de vie des riverains et usagers d’un nombre non négligeables de ces rues, essentiellement dans l’Ouest du Pentagone. L’unique station de mesure de la qualité de l’air dans le Pentagone est située à Sainte Catherine (Quai aux Briques). Impossible donc de chiffrer le niveau de pollution de ces rues, d’autant que cette station n’est pas équipée pour mesurer les particules fines.

Multiplication des opérations commerciales et festives
en partenariat avec les sociétés de parkings

Face à ce constat, la Ville est aujourd’hui placée devant le double paradoxe à la fois de tenter de ramener des automobilistes vers le piétonnier et de prendre ainsi le risque d’aggraver un peu plus le trafic des poches de circulation qu’elle a elle-même créées dans les rues latérales et dont elle ne cesse de modifier le tracé. Modifications qui ne font que renforcer le sentiment d’amateurisme et d’improvisation qui se dégage de l’ensemble du projet.

Fin du test ?

Amateurisme, encore ? La Ville détricote son plan de circulation place De Brouckère, boulevard Lemonnier, rue du Midi, à Saint-Géry, toujours sans étude préalable…  Situation exemplative parmi d’autres , dans les quartiers avoisinants : la place du Jardin aux Fleurs devenue semi-piétonne depuis plusieurs années, pour le plus grands bénéfice des riverains, des commerçants et des  écoles situées à proximité. Mais le plan de circulation lié au  plus grand piétonnier d’Europe a rouvert la place au trafic de transit. Pire, les changements à venir, pour tenter de limiter les conséquences néfastes du plan de circulation dans des rues voisines, font craindre aux riverains qu’elle devienne un danger permanent pour leurs enfants. Amateurisme… ou inconscience?

Fin de la saga des parkings supplémentaires ?

Amateurisme toujours? Dix-huit mois après les annonces tonitruantes de parkings jugés « nécessaires », d’appels d’offres tous azimuts, de tergiversations sur l’emplacement du parking des Marolles, aujourd’hui à la Ville, c’est le silence radio. Aux dernières nouvelles, les sociétés de parkings auraient poliment décliné. Une étude d’incidences bien menée aurait épargné tout ce gâchis et probablement conclu qu’avec 8.500 emplacements de parkings publics dans le Pentagone (14.000 en comptant ceux situés sur la petite ceinture), il n’y avait nul besoin d’en construire davantage et qu’il vaudrait mieux mettre (enfin) en place un système de télé-jalonnement, comme cela se fait à peu près dans toutes les grandes villes…

Fin des illusions ?

En annonçant son projet de « plus grand piétonnier d’Europe », la Ville avait parlé de « projet de société » et de « révolution des mentalités ». Dans sa grande majorité, la société civile demande également du changements en faveur d’une cité agréable à vivre pour tous à commencer par ses habitants. Mais la classe politique bruxelloise dans son ensemble, en se bornant à courir derrière des standards internationaux d’une ville formatée pour le tourisme, ne fait qu’entretenir l’illusion déjà dépassée selon laquelle un piétonnier conçu comme une simple zone « attractive » pour le touriste ou accessible aux visiteurs extérieurs, de préférence motorisés, améliorerait la qualité de vie de ses électeurs.

A quand  « a place to live » plutôt que « the place to be » ?

Face à ces déconvenues à répétition, la Platform Pentagone rappelle et revendique la mise en oeuvre d’un réseau de piétonniers adapté prioritairement aux réalités endogènes de Bruxelles, implanté de manière judicieuse dans le tissu urbain, respectueux de l’environnement social, culturel et économique du territoire, comme proposé, par exemple, par le bureau d’études Secchi-Vigano à la région en 2012. La diminution de la pression automobile ne peut se faire que si elle profite à tous. Le « plus grand piétonnier d’Europe », conçu à l’emporte-pièce de manière autoritaire et sans véritable concertation, ne rencontre malheureusement pas les objectifs pourtant partagés par les membres de la Platform et par de nombreux Bruxellois.

Un nouveau projet doit émerger en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, en s’appuyant sur des objectifs partagés, des études objectives étayées par des données transparentes et publiques et une méthodologie claire.

D’autres scénarios sont possibles : dans son communiqué du 25 janvier 2016, la Platform lançait des pistes de réflexion en ce sens.

Yvan Mayeur clame sur les réseaux sociaux que la Ville se mobilise pour la rénovation des tunnels pour permettre l’accessibilité au centre habité en voiture. Dans le même temps, il impose un concentré de 50 hectares sans voiture aux conséquences asphyxiantes pour les habitants et les commerçants : quel paradoxe!


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